L’explication

Je te propose deux exercices pour comprendre :

1) Pourquoi ton enfant est si difficilement «raisonnable» en période de conflit.

2) Pourquoi si souvent, tu t’emportes, même si tu veux rester calme.

Exercice # 1 : Le cerveau dans la main

Voici un exercice pour comprendre comment fonctionne le cerveau de ton enfant. Pour bien visualiser, nous allons utiliser notre main.

Imagine. Ton avant-bras est la colonne vertébrale de ton enfant.

Maintenant, replis ton pouce à l’intérieur de la paume de ta main : c’est la partie qu’on appelle le cerveau moyen, le siège des émotions et des
réactions en cas de stress (soit l’attaque, la fuite ou l’immobilisation). Maintenant, referme les doigts sur ton pouce. Tu obtiens maintenant le
cortex : la partie du cerveau qui permet de raisonner, de penser et de prendre des décisions. La partie avant de ta main avec les ongles est le
front ou le cortex préfrontal. De façon encore plus précise, c’est cette partie qui permet de gérer les émotions, la moralité, la prise de décision et
la logique.

C’est de là que partent l’intelligence du cerveau et la capacité de prendre des décisions.

Maintenant, déplie tes doigts et remets-les bien droit vers le haut : quand ton enfant est en colère, quand il crie, quand il est en crise, son cerveau est
comme ça.

À ce moment, il est déconnecté de sa capacité à s’organiser, à gérer ses émotions, à prendre des décisions, à se mettre à la place de quelqu’un
d’autre, à être flexible.

Bref, il ne peut pas raisonner. Quand son cerveau est comme ça, ce sont les réactions au stress qui sont en fonction (l’attaque, la fuite ou
l’immobilisation).

Physiologiquement, ça veut dire qu’à ce moment, ton enfant est INCAPABLE DE RAISONNER. Lors d’une colère, d’une grosse peine, d’une
peur ou d’une crise, ton enfant est dans son cerveau rouge et il n’est pas capable d’écouter ce que tu lui dis et d’entendre raison. Ça ne sert à rien
d’essayer.

Ce que tu dois plutôt faire, c’est UNE PAUSE. Une connexion de cœur à cœur avec ton enfant pour permettre à son cerveau de se recentrer et
retrouver sa capacité à raisonner. Pour reprendre l’image : permettre aux doigts de se refermer et former à nouveau un poing.

Oui, la NATURE fait bien les choses et l’être humain apprend par l’exemple. Le bébé et l’enfant n’y font pas exception : ils ont besoin de modèles pour
apprendre à GÉRER LEURS ÉMOTIONS.

Après avoir fait l’exercice du modèle dans la main, tu comprends que chaque fois que tu vis de l’impatience, tu es, toi aussi, dans ton cerveau
rouge. Mais comment se fait-il que tu te retrouves quand même à perdre le contrôle de toi-même si souvent, alors que tu sais que tu dois être un
modèle pour ton enfant? Après tout, c’est toi l’adulte, non?!

Pourquoi est-ce qu’on se retrouve si souvent et si facilement, nous adulte, dans cet état de stress (attaque, fuite, immobilisation ou péter sa coche!)
devant un enfant sans malice et dont on sait que le cerveau n’est pas encore mature?!

Alors que l’on devrait plutôt prendre soin de lui, l’aider à se calmer lorsqu’il pleure ou même lorsqu’il fait une crise et être ce fameux modèle!

Tu sais, dans ta tête, que tu devrais rester calme, mais tu n’y arrives pas.

C’est que tu ne l’as pas appris quand tu étais petite. Parce qu’on n’a pas pris soin adéquatement de tes émotions quand tu étais petite.

Probablement que lorsque tu étais enfant et que tu étais en colère, ou que tu pleurais parce que tu étais triste, tu as reçu beaucoup de réponses telles
que :

• Arrête de pleurer ou tu vas aller faire dodo…
• Chut, chut… C’est pas grave, arrête de pleurer.
• Si tu n’écoutes pas, tu vas aller dans ta chambre.
• Ce n’est pas grave… Ça fait pas mal.

Alors que OUI, tu avais le droit d’être en colère, d’avoir de la peine, d’être déçue et surtout d’être écoutée.

Tu sais maintenant comment tu te sens lorsque tu reçois des réponses qui nient l’émotion difficile que tu vis. Imagine alors un petit enfant.

(Note: Le modèle du cerveau dans la main provient du neuropsychiatre américain Daniel J. Siegle)

 

Exercice # 2 : L’enfant dans l’adulte

Rappelle-toi un moment de ton enfance où tu t’es sentie vraiment incomprise, pas écoutée, seule, apeurée ou abandonnée.

Exemples :

• Tu as 3-4 ans et tu apprends que pendant ton sommeil, tes parents sont partis pour plusieurs jours sans te le dire et qu’ils te font garder chez une
tante.

• Tu as 5 ans et ton plus grand désir, c’est que ton papa t’apprenne à faire du vélo sans petites roues. Mais il est trop impatient et décide plutôt de
rentrer dans la maison et te laisse seule sur le trottoir.

• Tu te rappelles petite, que tu pleures et tu appelles « maman » parce que ton papa te laisse seule dans ta chambre, probablement dépassé ou
découragé de la situation difficile qu’il vient de vivre avec toi.

Si aucun souvenir ne monte en toi présentement, rappelle-toi une grande peine ou une grande colère que ton enfant a vécue dernièrement. Peut-être qu’à ce moment, tu as su l’écouter, ou pas. Sans juger, fais monter ces
souvenirs en toi.

Maintenant, regarde cette photo :

 

Love par Alexander Milov, crédit photo: Vitaliy Deynega
Love, par le sculpteur Ukrainien Alexander Milov (crédit photo: Vitaliy Deynega)

 

Choisis un adulte-enfant sur la photo pour te représenter.

Imagine-toi maintenant dans une situation de ton quotidien : tu es devant ton enfant qui pleure, qui chigne, qui crie ou qui boude parce qu’il a de la
peine, qu’il est fâché ou qu’il n’a pas ce qu’il désire. À ce moment, ton petit, c’est l’autre enfant de laphoto.

Comme sur l’image, même si tu es maintenant adulte, un petit enfant vit toujours à l’intérieur de toi. Et quand tu as devant toi ton enfant en pleurs,
qui souffre, c’est le petit enfant en toi qui est directement connecté à cette douleur, à celle que tu as, toi aussi, ressentie quand tu étais enfant. Peut-être pas exactement la même, mais une situation semblable à ce que vit
présentement, en 2016, ton petit en pleurs devant toi.

Le chemin le plus facile, si tu as toi aussi manqué d’écoute quand tu étais petite, c’est d’imiter (inconsciemment) tes parents et offrir à ton enfant le
même type de réponses que tu as reçues : conseils, questions, banalisation, dramatisation. Et le classique : «Arrête de pleurer».

Et voilà que tu te retrouves à répondre à ton enfant avec les mêmes paroles qui t’ont tellement fait mal petite, sans que tu comprennes
pourquoi.

En bref, ton cerveau n’aime pas souffrir, c’est l’instinct de survie.

En cas de conflit avec ton enfant, ton cerveau préfère s’identifier au modèle qu’il a reçu de tes parents. Il préfère s’identifier à l’adulte, au modèle qu’il a
reçu, plutôt que de s’identifier au petit enfant sans défense, sans repères et sans écoute devant lui, cette deuxième option étant beaucoup plus
menaçante.

Quand tu es en colère face à ton enfant, que tu vis de l’impatience et que tu t’emportes, tu es comme l’adulte avec le dos tourné sur la photo.

Par contre, quand tu prends la décision de connecter avec ton enfant et d’écouter sa peine ou sa colère, tu acceptes de te brancher à l’enfant que
tu étais et d’offrir à ton petit l’écoute et l’accueil dont il a besoin, l’écoute et l’accueil dont tu aurais eu besoin toi aussi petite.

Quand tu es en mode « écoute » avec ton enfant, tu es comme l’enfant sur la photo qui connecte avec l’autre enfant devant lui.

Si tu souhaites approfondir tes connaissances sur ce phénomène (qu’on pourrait résumer à l’attachement) et avoir accès à de l’information plus
concrète et scientifique pour mieux comprendre encore, je t’invite à lire le travail d’Isabelle Filliozat, auteure-psychothérapeute-conférencière française qui a écrit plusieurs livres sur la parentalité.

Voici une vidéo très instructive à ce sujet : Comment rebrancher son cerveau ? | Isabelle Filliozat | TEDxVaugirardRoad – YouTube