Les cris
«J’ai de la difficulté à croire qu’il y a d’autres mères comme moi, qui se sentent dépassée, qui trouvent ça vraiment difficile d’être une mère, qui crient».
– Marilyn
La violence et les cris sont un sujet très tabou pour les mères.
Non seulement je viens te confirmer que tu n’es pas seule, mais je t’annonce aussi que nous allons utiliser tes cris pour débuter ta transformation.
Parce que tu es ici pour explorer le plus beau et le plus laid de la maternité. Nous allons explorer le plus laid, pour le transformer en beau.
Et ça commence par tes cris.
Ce que tu cris, c’est à toi que tu le dis.
Je commence avec cette phrase très simple pour te faire prendre conscience que ce que tu cries, c’est ce que tu as besoin d’entendre et ce que tu as besoin d’appliquer dans ta propre vie, à ce moment précis.
Ce principe peut s’appliquer à ta vie en générale et il peut aussi s’appliquer à la situation précise que tu es en train de vivre avec ton enfant.
Quand tu sens qu’une situation te crée de la frustration, que tu deviens dans ton cerveau rouge et qu’à ce moment c’est partie sans que tu puisses contrôler, tu te vois aller, tu te vois sortir de toi-même sans que tu sois capable de te retenir. Donc crier pour moi, ça peut être littéralement de crier très fort après les enfants et aussi de ne pas être capable de retenir un flot de paroles, souvent très agressives. Sentir que ça doit sortir, tout d’un coup et une bonne fois pour toutes. C’est quand on est incapable de le retenir à l’intérieur.
Je vous donne un exemple de sens que moi j’ai réussi à trouver à force me m’observer, du sens que j’ai pu appliquer à ma vie en générale.
La phrase qui était répétitive pour moi, c’était la phrase : «Si je ne le fais pas moi-même, personne d’autre va le faire».
Par exemple, j’arrivais chez moi et le bain n’était pas donné, les lunches n’étaient pas faits, des choses trainaient dans la maison. Je devenais très colérique, le flot de frustration sortait, souvent à mon chum!
À partir du moment où j’ai été capable de m’observer et de me nommer à moi-même cette phrase, j’ai pu faire des liens entres les situations de mon quotidien qui étaient frustrantes et l’histoire de ma famille. Voilà pourquoi je vous dis qu’on peut d’abord faire un lien avec notre vie en générale.
Et pour moi, le sens était que dans mon histoire familiale, les hommes étaient souvent absents. Soit par un problème d’alcoolisme, soit par une mort prématurée, soit par une personnalité effacée, soit par un travail à l’extérieur de la ville. Mon propre père, mon beau-père, mes grands-pères, à leur façon, sont/étaient des hommes absents.
Une fois que j’ai été capable d’isoler cette phrase qui montait en moi : «Si je ne le fais pas, personne ne va le faire», j’ai été capable d’y réfléchir en dehors de mes moments de colère. C’est à ce moment que j’ai été capable de trouver du sens et de faire des liens. Comme si c’était inscrit en moi à cause de mon histoire.
Une fois que j’ai été capable de donner du sens à ces cris, à cette colère à l’intérieur de moi, j’ai été capable de l’apprivoiser, de me sentir moins coupable.
J’ai identifié cette partie de ma personnalité comme une zone sensible. Elle est encore présente et je crois qu’elle le sera toujours. Je sais qu’il existe une partie à l’intérieur de moi qui se transforme rapidement en victime quand elle se sent abandonnée, quand elle se sent non soutenue. Quand il y a injustice.
Quand je vis une période de ma vie où je me sens plus fragile, les détails du quotidien vont venir me rappeler ce besoin que j’ai de prendre moi-même les devants pour recevoir du soutien.
Si tout à coup je trouve que mon chum n’en fait pas assez dans la maison, que j’ai trop de chose à l’agenda, que tout me semble compliqué (le transport des enfants, préparer la bouffe, le dodo, les RDV qui s’accumulent), que je me sens perdre le contrôle, je sais que je suis fragilisé et que je dois prendre les moyens pour retrouver le Nord.
Ça veut dire laisser tomber des choses, faire confiance que tout va se placer (lâcher-prise), l’exprimer à mon chum, etc.
Et c’est fascinant comment on peut observer les détails du quotidien, prendre conscience de ce que ça nous donne envie de crier et constater comment ça peut s’appliquer immédiatement dans la situation qu’on vit. Ensuite, on peut extrapoler pour trouver du sens dans notre vie générale.
Alors ce que je te demande de faire, c’est d’observer tes cris.
Voici les étapes :
- Prendre conscience que tu es sur le bord de crier, ou que tu as crié alors que ce n’était pas nécessaire. Ne pas te juger d’avoir crié. Parce que si tu tombes dans le jugement, tu vas t’empêcher de faire cet exercice, fondamental pour CALMER LE FEU. Ne pas essayer d’arrêter de crier (ça viendra plus tard).
- Nommer à l’intérieur de toi ce qui voudrait sortir ou ce qui est sorti, peu importe ce que c’est. Même si c’est très laid.
- Une fois que tu es calmée, plus tard dans la journée, revenir mentalement à ce qui voulait sortir/ce qui est sorti en paroles. Te demander intérieurement pourquoi cette phrase voulait sortir et te répondre à toi-même.
- Répéter ce questionnement, jusqu’à ce que tu trouves du sens.
Tu sauras que tu as trouvé du sens quand tu ressentiras un poids qui tombe de tes épaules, une tristesse qui monte (peut-être même l’envie de pleurer) et/ou une petite étincelle de joie.
En pratiquant cet exercice Ce que tu cris, c’est à toi que tu le dis, tu mettras de plus en plus rapidement et facilement le doigt sur la partie de toi dont tu dois prendre soin en ce moment, ce qui va t’aider à être de plus en plus souvent la mère que tu désires être.
Ce que tu cris, il faut que tu commences à l’écouter.
Parce que le danger, si tu continues à te laisser crier, c’est que tu te maintiennes dans ton rôle de victime. Tu vois rouge, le problème appartient à tout le monde autour sauf à toi, tu trouves que tu fais pitié et le cercle vicieux continue de tourner :
Tu vis une situation difficile, tu te mets à crier, ça crée de la tension, tu regrettes, tu te sens mal, tu te sens coupable et ça recommence.
La seule façon de s’en sortir, c’est de prendre conscience de ce qu’on a envie de crier, le nommer, l’observer et trouver du sens, une fois calmée.
Cet exercice ne se fait pas obligatoirement sur le coup, parce qu’une fois qu’on est dans notre cerveau rouge, on n’est physiquement incapable de réfléchir. Une fois que la tempête est passée, tu peux revivre la situation intérieurement et te forcer à ressentir à nouveau l’émotion et débuter le questionnement.
Pourquoi je ressens ça? Et voir ce qui monte…
À partir de maintenant, je veux que tu arrêtes de te dire : Je cris, donc je suis une mauvaise mère. À partir de maintenant, tu n’es plus dans le jugement, mais dans la conscience :
Tu es une bonne mère Et parfois tu cries.